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Aide aux migrants : Le Conseil constitutionnel consacre le « principe de fraternité »


Le Conseil constitutionnel a affirmé vendredi qu’une aide désintéressée au « séjour irrégulier » ne saurait être passible de poursuites, au nom du « principe de fraternité », et a censuré en conséquence des dispositions du Code de l’entrée et du séjour des étrangers. Cette décision, qui promet de résonner comme un coup de tonnerre dans un contexte politique européen tendu, répond à une demande de Cédric Herrou, un agriculteur devenu le symbole de l’aide aux migrants à la frontière franco-italienne et qui réclamait l’abolition du « délit de solidarité ».

Pour la première fois, le Conseil constitutionnel consacre le « principe de fraternité », rappelant que « la devise de la République est +Liberté, Egalité, Fraternité+ » et que la loi fondamentale se réfère à cet « idéal commun ». « Il découle du principe de fraternité la liberté d’aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national », selon le texte de la décision. Pour permettre au législateur de remédier à l’inconstitutionnalité constatée, le Conseil reporte au 1er décembre 2018 la date d’abrogation des dispositions contestées. Devant le Conseil constitutionnel, Cédric Herrou et un autre militant de la vallée de la Roya, tous deux condamnés pour aide au séjour irrégulier, avaient attaqué deux articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers.

Ils visaient l’article 622-1, qui punit l’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier de cinq ans d’emprisonnement et 30.000 euros d’amende, et l’article 622-4, qui précise que cette aide ne peut donner lieu à des poursuites lorsqu’elle est le fait de la famille ou « de toute personne physique ou morale, lorsque l’acte reproché n’a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte ». Le texte précise ensuite que cette aide autorisée consiste notamment « à fournir des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d’hébergement ou de soins médicaux (…) ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique ». Un texte « trop vague » pour les défenseurs des militants, qui permettait de sanctionner l’aide humanitaire de la même façon que la criminalité organisée des filières de passeurs.

« En réprimant toute aide apportée à la circulation de l’étranger en situation irrégulière », le Conseil constitutionnel estime que le législateur n’a pas respecté l’équilibre entre « principe de fraternité » et « sauvegarde de l’ordre public ». Il censure donc partiellement l’article L 622-4, sortant du champ des poursuites toute aide humanitaire au « séjour » comme à la « circulation » des migrants. En revanche, « l’aide à l’entrée irrégulière » reste sanctionnée. Concernant les conditions d’immunité listées dans ce même article, le Conseil constitutionnel émet une « réserve d’interprétation », c’est-à-dire qu’il précise le sens que l’on doit donner au texte: ainsi, l’immunité devrait s’appliquer aux situations énumérées (conseils juridiques, soins médicaux…) mais aussi « à tout autre acte d’aide apporté dans un but humanitaire ».

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